L’EXPOSITION DECRAYONNER
INFORMATIONS PRATIQUES
Du 1er Avril au 13 novembre 2016
CITE DE LA DENTELLE ET DE LA MODE
135 quai du Commerce, 62100 Calais
T. + 33 (0)3 21 00 42 30 –
www.cite-dentelle.fr
facebook.com/citedentelle
cite-dentelle@mairie-calais.fr
Ouvert tous les jours, sauf le mardi. De 10h à 18h.
(et de 10h à 17h du 1er novembre au 31 mars)
Fermeture le 1er mai.
AnneValérieHash, créatrice essentielle de la scène française, une des rares maisons à avoir
obtenu le label prestigieux de la Haute Couture. Cette exposition, la première à lui être consacrée en
France, retrace ses 13 premières années de création. Plus qu’une rétrospective, il s’agit d’une
exploration d’un univers en cours de fabrication. Une centaine de pièces vestimentaires uniques, vidéos
et documents exclusifs révèlent un vocabulaire stylistique et analysent le processus créatif. Les pièces
sont, à l’exception de prêts du Palais Galliera – Musée de la Mode de la Ville de Paris, extraites des
archives personnelles de la Maison Anne Valérie Hash.
Introduction
par Anne-Claire Laronde, directrice de la Cité de la dentelle et de la mode
PARMI LES MATIÈRES de prédilection d’Anne Valérie Hash figure la dentelle tissée,
fleuron du patrimoine industriel textile européen. L’inviter à présenter l’ensemble de son travail en
regard des collections de dentelle, c’est aussi quelque peu donner à voir l’étendue des possibles
auxquels peut se prêter cette matière noble. Dos nus, combinaisons androgynes, robes asymétriques,
blouses légères et tops rétroréfléchissants,Anne Valérie Hash se joue des usages pour proposer des
pièces où la finesse de la dentelle est employée d’une façon subtile et cohérente. Ses vêtements
attestent qu’elle est une fine connaisseuse et amoureuse de cette matière complexe, l’une des rares
créatrices à maîtriser la variété
des usages que permet ce textile mal connu. Sans pour autant être le sujet principal de l’exposition,
nombre de pièces exposées font montre de cette virtuosité.
EXPOSER Anne Valérie Hash permet aussi une belle rencontre avec une
équipe vive et
soudée. Si la mode a l’usage de mettre en avant la figure du créateur, toujours elle se construit dans
la symbiose d’une équipe tres resserrée. Avec Anne Valérie Hash, cet exercice collégial s’est étendu
avec grand profit à la préparation de la présente exposition « Anne Valérie Hash. Décrayonner ». Sylvie
Marot, la commissaire de l’exposition, a oeuvré au plus près de la créatrice. Les créatifs qui
l’accompagnent témoignent d’une vivacité précieuse et communicative qui éveillera chez tous, nous
l’espérons, curiosité et intérêt sincère pour les subtilités de ses recherches créatives.
Décrayonner Anne Valérie Hash
par Sylvie Marot (extrait du catalogue d’exposition)
DÉCRAYONNER, une création lexicale en guise de titre ? La question à se poser n’est pas
:
ce verbe
existe-t-il ? Mais plutôt ce verbe est-il créable ? Et si oui, quel sens lui donner ? (…) Si crayonner
engage une idée de rapidité et d’immédiateté, décrayonner sous-entendrait une notion de lenteur et de
recul. Aux grands traits, on opposerait le détail. Surtout, la réversibilité du geste serait similaire
au procédé cinématographique de la marche arrière. Décrayonner use de ce trucage pour comprendre le
truc. (…)
Tenter du moins.
AINSI L’EXPOSITION Décrayonner détaille la création en action d’une
couturière qui
n’aborde pas le
travail de couture par le crayon mais par le ciseau et l’aiguille. Il ne sera pas question de crayonnés,
de croquis ou d’esquisses, mais de vêtements, de toiles et de patrons. Et si trace de crayon il y a, ce
serait plutôt celle de la craie de tailleur. (…)
LA COUTURE de Anne Valérie Hash réside initialement dans ses découtures. On devine dans
ses coupés francs
et frangés le goût de l’inachevé, dans le non ourlé la trace de l’arrachement. Ses bords laissés à vif
voire volontairement effilochés sont une frontière en pointillé entre textile et peau. De suture à
guipure, ce non finito laisse place aux bords dentelés et à l’incrustation maîtrisée. Les dentelles
prismatiques de « Pause » (collection été 2014) en sont la parfaite illustration.
DÉBÂTI ET REBÂTI, décousu et recousu, accidenté à dessein, chaque
vêtement s’observe à
travers le détail.
Peu importe la torsion des tissus, la désorganisation des patrons, la multiplication des éléments, il
s’agit de créer un équilibre à partir du déséquilibre préexistant. La couture est le lieu de la main
artiste comme de la main artisane. Son luxe consiste à prendre le temps de défaire et de faire.
ANNE VALÉRIE HASH questionne la matérialité des étoffes. La toile de coton et la laine
sèche des costumes
d’homme se marient aux tulles et aux mousselines de soie. Les paillettes et broderies réveillent la
matité des étoffes. Effet liquide des organzas ultra légers, effet fluide des jersey de soie. Les
dentelles, chinées ou nouvelles, se mélangent dans des mille-feuilles complexes ou se confrontent à des
tissus techniques. Soupeser l’épaisseur du temps, se projeter dans un futur accéléré, c’est idem.
SA GAMME CHROMATIQUE se concentre sur les noirs et les ivoires, les
coloris lavés et les
chair. Les
photographies, noir&blanc de Michelangelo di Battista, les éclairages troublés de Bettina Rheims ou les
tonalités poudrées de Fabrice Laroche, semblent fixer cette colorimétrie sélective. Dans les laines
charbon ou dans les dentelles anciennes se
lit la patine sépia. (…) Et pourtant les couleurs vives percent avec le temps. Mais plus que la
couleur, c’est la lumière qui fait son entrée. Lumière blanche des tissus rétro-réfléchissants, lumière
arc-en-ciel des tissus iridescents. Enfin, les plissés et drapés, dans l’ondoiement de la marche, ne se
lassent pas de jouer avec les ombres.
DÉFINITIVEMENT, Anne Valérie Hash coud les contraires et faufile les
opposés. Elle
équilibre les notions
de modernité et de tradition. Elle déséquilibre les symétries et les volumes. Anne Valérie Hash assemble
les opposés sans adversité. Et définitivement, elle chemine vers la féminité.
Le parcours
L’ENTRÉE EN MATIÈRE de l’exposition se fait dans une atmosphère
lumineuse
d’atelier. Une dizaine de toiles posées sur des mannequins de couturière accueille le visiteur. La toile
est un prototype de vêtement en trois dimensions. Cette mise en volume du patron de base permet les
ajustements sur le corps. Une fois le patron de papier modifié, le vêtement sera bâti dans le(s) tissus
choisi(s). Les ennoblissements (broderies, applications) suivront. Sur ces toiles de coton grège, on lit
les traces de craies de tailleur, de feutres colorés, autant d’indications d’ajustements. Ces
objets, documents de travail, sont rarement conservés, et encore plus rarement exposés. Ces toiles
crayonnées sont des brouillons de vêtements.
RESSENTIR la matière à défaut de pouvoir la toucher (la fragilité
des tissus ne
l’autorise pas).
L’absence des vitrines de verre marque le désir de proximité avec des vêtements. Il est question de
réduire la distance entre le vêtement destiné à être porté et l’objet vestimentaire momentanément
objetmusée. Mais surtout il s’agit d’insister sur la
matérialité des étoffes. Des boîtes noires enchâssent sobrement les vêtements. Sur les tableaux noir
ardoise d’écolier, les titres sont partiellement écrits à la craie. L’art de Anne Valérie Hash est peu
ostentatoire. Le visiteur est invité à se concentrer sur les détails. L’enjeu est de percevoir, derrière
une certaine sobriété des matières, l’intelligence des coupes.
UN PARCOURS THÉMATIQUE
De la première pièce, une robe construite à partir d’un pantalon d’homme, à la dernière, un costume
tailleur en dentelle et tissu réfléchissant, c’est un style qui s’affirme. L’exposition évolue
chromatiquement du noir vers la lumière. Au sein de la salle d’exposition permanente de 500 m2, le
parcours est organisé en quatre grandes thématiques et treize sous-thèmes stylistiques. Ses treize
ensembles se dédouanent de la chronologie pour se concentrer sur le vocabulaire stylistique. Des verbes
qui disent le geste, qui précisent l’action ou leur conséquence.
Crédits photos : Fabrice Laroche // www.fabricelaroche.com